Commentaires | | | extrait du livre page 18-19
.... On trouve dans ces «magasins en gros» des «estampes de tous formats, cartes géographiques, vues et paysages, imageries fines et communes, cartes et dessins pour albums». C'est le cas de P. Cremetti, éditeur installé au n°8 de la rue de l'Impératrice. La carte porcelaine qu'édite pour son propre compte l'«imprimerie en taille douce et lithographie» de Braulart-Watiez, au 13 de la Montagne de la Cour, est parmi les plus réussies. On y découvre trois ouvriers supportant une pierre lithographique géante sur fond de Ville de Bruxelles. L'«imprimerie militaire» de J. T. Lallois, 8 rue de la Fontaine, confie sa publicité à son confrère F. Schildknecht, installé au 36 de la rue de la Fourche. C'est l'occasion de deux jolies vues miniatures inscrites dans deux médaillons roses. Delfosse, «lithographe de la Cour», nous propose une vue de ses ateliers, au 16 de la rue d'Assaut, «près Sainte-Gudule» dont les tours se profilent à l'arrière-plan. C'est la cathédrale encore qui figure sur cette somptueuse carte que distribue Carbote Van Dinter qui occupe le n° 15 de la rue du Marquis, au coin de la place du Parvis. Le nom des Frères Carbote est célèbre en ville: ils ont leur bureau au 18 de la rue des Fripiers tandis que leur «établissement lithographique» attire la foule des amateurs au n° 7 de la rue de Ruysbroeck.
Moreau, rue de la Violette, Hannotiau, rue aux Choux, Bombeke, rue des Bateaux, Leslein, rue Fossé aux Loups, Van Gorp, Marché au Charbon.., quelques noms parmi tant d'autres qui offrent «factures, mandats, cartes d'adresse et de visite, circulaires, prix courants, lettres de faire-part,étiquettes, musiques»... et cartes porcelaine. Univers magique, créateur d'images dont aucune, jamais, n'est quel¬conque.
Cousins par alliance spirituelle, éditeurs, libraires, magasins d'estampes, papetiers, marchands de tableaux viennent ajouter leur enseigne à celles déjà citées, complétant ainsi la grande famille des marchands d'esprit. Ici comme ailleurs, la somptuosité des cartes porcelaine est à la mesure de la notoriété de celui qui l'édite. C. Granzella, «fabrique et magasin d'estampes», figure au premier rang. Il nous a laissé une remarquable image du magasin qu'il a installé au 56 de la rue Saint-Jean, à l'angle de la place, là où le béton anonyme se substituera, un jour des années 1970, aux jolies vitrines gonflées de «gravures, estampes en tous genres, études de paysage, têtes, vues marines, animaux, fleurs, oiseaux, ornements, albums, atlas, pinceaux, couleurs, encadrements, passe-partout...» L. Fisco, «peintre», tient boutique, quant à lui, à l'enseigne de La Palette de Rubens, au n° 11 du Marché aux Bois, dans le quartier de la Putterie.
C'est chez lui que les artistes bruxellois se fournissent en «brosses, pinceaux, palettes, chevalets, appuie-mains, boîtes, couleurs en vessie et en tablettes, toiles, vernis, et généralement tous les articles qui concernent la peinture à l'huile, le dessin, et fournitures de bureau»: C'est à Daveluy, «lithographe du Roi», installé à Bruges que Fisco confie l'exécution de sa carte porcelaine. C'est ce que fait aussi Verlinde, papetier au 34 de la rue des Pierres. C'est ce que fait encore Boisacq qui vend «articles de bureaux, papiers de fantaisie, imageries-dentelles et lithographies coloriées» au n° 69 de la rue de la Madeleine. De son côté, Olin, papetier rue de la Montagne 79, s'adresse à G. Jacqmain, lithographe à Gand... Serait-ce qu'ils ne sont pas en bons termes avec leurs confrères bruxellois? C. Verassel-Charvet, lui également, préfère Daveluy. Il tient l'importante Librairie Romantique située dans la Petite Rue Neuve des Carmes, «près de Manneken-Pis». Ses vitrines regorgent des somptueux cartonnages d'éditeur qui relient les œu¬vres de Walter Scott, Jules Sandeau, Fenimore Cooper, Eugène Sue, Alexandre Dumas. On y prend des abonne¬ments de lecture, on s'y procure les dernières caricatures françaises signées Daumier ou Gavarni, on y trouve des «gravures pour Costumes de Carnaval». Spécialisé dans le reblanchissage à neuf des estampes, J.B. Clerckx encadre et vend tableaux et gravures au n° 4 de la rue Saint-Lazare. C'est à ses ateliers que les peintres confient leurs œuvres nouvelles. Elles en reviennent serties dans des bois rares, «de Mahony, de Palissandre, d'Erable, de Citrons, d'Ecaillé et d'Acajou».
A en croire l'Almanach de Poche que publie chaque année M.E. Rampelbergh, imprimeur-libraire rue de la Fourche— et pourquoi ne pas le faire? — le Bruxellois de l'an 40 lit beaucoup. Les cabinets de lecture font recette, particulièrement celui de la librairie encyclopédique installé au 52 de la rue des Alexiens. «On y trouve toutes les nouveautés». MM. Pratt et Barry ont ouvert un cabinet de lecture anglaise au 14 de la place Royale, à deux pas de la grande librairie de C. Muquardt. La librairie médicale de J.B. Tircher, au 20 de la rue de l'Etuve, contient un important dépôt de livres de chirurgie et de pharmacie. On y reçoit les abonnements à tous les journaux de science. Des bouquinistes attendent les bibliophiles au 17 de la rue de la Petite Ile, au 15 de la rue de Bavière, au 16 de la rue des Alexiens. MM. Larglet et Prudhomme tiennent une «librairie au rabais» au 87 de la rue de la Madeleine... |